Carnet de route

GRAN PARADISO juillet 2022

Le 24/08/2022 par Daniel Goualou

 

Séjour Randonnée Montagne en VAL d’ AOSTE

De Val de Rhèmes en Valgrisenche

Parco Nazionale Del GRAN PARADISO - Italie -

Du 26 juin au 2 juillet 2022

Club Alpin Français du Pays de LORIENT

 

Comment aller en Italie sans savoir parler Italien, mais réussir à se faire comprendre par nos amis outre-alpins ? Aller en Val d’Aoste et le tour est joué !

Fondée par l’Empereur romain Auguste, la ville d’Augusta Praetoria Salassarum a joué de son éloignement des grands centres politiques qui lui vaut la reconnaissance de province autonome actuellement. Ayant brièvement fait partie de la France sous le 1er Empire (1814) en étant inscrit dans le département de la Doire, elle est membre de l’Association Internationale des Régions Francophones... Comme le Québec !

Ha ! La Doire ou Dora di REMA et di VALGRISENCHE... Ce sont les petites sœurs de la Grande Dora Baltea (Doire Baltée) qui canalise toutes les eaux alpines du massif du MONT BLANC... Un des plus gros torrents d’Europe évidemment.

C’est donc au son du clapotis de la Doire Di Rhèmes que nos randonneurs bretons chaussent leurs godasses pour un premier tour du Val d’Entrelor, en ce dimanche 26 juin. Petit sac à dos avec juste le coupe-vent et le pique-nique pour découvrir ces alpages et ces mélézaies piquées de lys-martagon et de grandes gentianes... Histoire de renouer avec les parfums subtils de l’été alpin. Passage près des vieilles bergeries voutées du Plan Di Feye et pause au Paso Gollien... Ici, les dénominations des lieux sont bilingues ; mais Daniel a pris sa carte de Alpes sans frontières (Alpi senza frontiere) : heureuse initiative des géographes valdotains et savoyards pour jumeler et se faire chevaucher les cartes franco-italiennes !

Pour ce soir, rdv à l’hotel chez LIDIA pour la cena et gouter au menu del giorno : vellutata di verdure con crostini di pane suivi évidemment d’un risotto alla valdostana et d’une bistecca ai ferri... Sans oublier le Tris di formaggi et la Pana cota ! Santé à tous !

Histoire de réjouir Valérie et Philippe qui prennent tous les deux des cours d’italien !

Mais la tenancière Lidia et son fils cuisinier savent tout nous expliquer en français le secret de leurs recettes... Grazie ! I buon Apetito !

C’est donc l’estomac bien calé qu’en ce Lundi 27 nos 7 nains de jardin... prennent les premiers virages du Tor des Géants, longue course alpine ou Trail qui doit se dérouler en septembre prochain ; nous rencontrerons chaque jour des « traileurs géants » qui viennent s’échauffer en vue de cette compétition ! La Grande Rousse (Alt 3607m) qui couronne le petit village de Rhèmes, a pris ses couleurs flamboyantes au soleil levant et le vallon du Col de la Fenêtre, adossé à son glacier, dresse ses raides lacets... Celui-ci est notre chemin de poucet pour aujourd’hui ; quelques passages équipés en «  via ferrata » comme celle « di Casimiro » ponctuent notre ascension... Mais Vincent et Daniel ne peuvent s’empêcher d’escalader la « Finestra », premier escalier de la Becca Di Tei... Nous sommes au pays des Punta et Cima et Becca !

Etape au refuge du Chalet de l’épée ce soir. Décidément, la banlieue savoyarde française se fait encore plus présente : car ce refuge ainsi appelé est établi sur la commune d’Usellière avec son beau lac de Beauregard, presque un copié-collé du versant Haute Tarentaise ! Et pour couronner la soirée, la Fratelli Gerbelle (les frères Gerbelle , gardiens du refuge) nous ont commandé un orage digne de la Divine Comédie de Dante , le poète italien toscan , qui aimait tant les feux d’artifice vénitiens... Même la haute Testa del Rutor (Alt 3486m) qui domine ce Valgrisenche en prend plein son glacier de gros grélons ; mais n’y a-t-il pas plus beau comme paratonnerre qu’une épée ! ! ! Seul dans sa prairie, le brave Oscar, solide mulet de la compagnie Cairn, ne bronche pas en restant tranquillement brouter sous cet étourdissant spectacle ! Demain, il continuera son bonhomme de chemin en portant les 13 sacs de ses randonneurs accompagnés... Sacré gaillard !

Mais nous n’avons pas pris cette option en ce matin du 28 juin et ferons nos propres mulets ; au programme : prévision d’une balade en jardin alpin avec juste un petit col perché à 2594m près de la Becca Refreita (Alt 2621m) ; mais l’étourdissement des effluves des fleurs alpines va tourner court ; les dieux sont tombés encore sur la tête à la descente du col et les trombes d’eau viennent grossir les torrents du Giasson et de San Martino... Daniel qui rèvait de faire pique-niquer ses compagnons sur le Piano de San Martino, histoire de revoir et montrer les belles pentes de neiges descendues du Truc Blanc (Alt 3294m) , gravies à ski en mars 2014 , et ainsi mettre l’eau à la bouche des skieurs bretons.

Ce soir toutes les combines sont inventées pour le séchage des godasses, chaussettes et pantalons ; mais la forteresse du rifugio Bezzi est pleine à craquer (90 couchages) et les étendages officiels ne suffisent plus. Mais l’accueil bon enfant et la gastronomie « fait maison »mettront tout le monde d’accord. Tant mieux, car nous y passerons deux nuits.

Aujourd’hui, mercredi 29 une balade en France est prévue... Histoire de faire coucou aux Ceutrons ! Mais qui sont ceux-la ? En fait, c’étaient les occupants de la Tarentaise à l’époque de l’Empereur romain Auguste, le mème qui a fondé la ville d’Aoste et qui devait négocier avec ce petit royaume bien installé dans ses montagnes et qui controlait la route de la Gaule pas encore complètement romaine. Bref, encore des irréductibles comme on en connaît en Armorique ! Ainsi, à la sortie du refuge sont indiquées les Voies Romaines 12 d et 12 e ; il n’y a plus qu’à lacer les godillots !

Philippe prend la photo de pose sur la passerelle suspendue au-dessus de la Dora Di Valgrisenche ; au-dessus, les raides pentes de la Becca Di Suessa et son Ghiacciaio (glacier) vont nous accompagner sur la Via 12d vers le col ou Paso Di Vaudet (Alt 2830m) ; ce matin est béni des dieux et cette fois-ci, ils ont laissé leurs tètes dans les nuages. Nous avons loisir ainsi de conter fleurette « sul sentiero dei fiori » !

L’arrivée à ce col-frontière permet de visualiser géologiquement cet ensemble de montagnes appelées les Alpes Graies ou Grées ; depuis le Col du Petit St Bernard jusqu’au Col de l’Iseran, elles présentent une certaine diversité ; un presque 3800 jaillit devant nous et en l’occurrence le Mont Pourri (Alt : 3779m) ; sa haute silhouette est constituée de parois rocheuses délitées : socle de grès et schistes carbonifères...Bref, un nom qui ne fait par rêver les grimpeurs ! ! !

 

Vers l’amont une Testa del Rutor : très vieux socle de gneiss daté de l’Age primaire, mais qui abrite le plus grand glacier (8 km²) de la chaine frontière : de quoi ravir les skieurs en mal de Mont Blanc, car situé en face ! ! !

Plus au sud, la longue et haute échine de La Grande Sassière (Alt : 3747m) constituée de schistes lustrés métamorphisés, aux faces italiennes impressionnantes, mais permettant des balades alpines de funambules sur leurs arêtes accessibles côté français : de quoi ravir les cordées alpines ! ! !

Mais notre détour par le Lago Nero (lac noir) nous fait découvrir le royaume des bouquetins... Depuis la crête de la Becca Di Percia (ou Pointe du Rocher Blanc), notre agitation de bipède laisse de marbre « blanc » les stambecci qui monte la garde sur ces éperons constitués de calcaires dolomitiques...

Ce soir, il y a eu relève au rifugio Bezzi... Assurée par une cinquantaine de « Décathloniens » ! Mais nos godasses et chaussettes sont sèches, donc pas de dispute, car rien à mettre au balcon, cette fois ! En fait, au détour du Col Vaudet, nous avions vu une longue colonne arpenter les alpages depuis le joli village du Monal.

Le Team « Forclaz » est en rando pour effectuer des tests «  grandeur nature » des futurs équipements en vente bientôt en rayon... De la chaussette au bob en passant par le sac de couchage et la tente, puisque certains font du bivouac !

Le challenge de ce jeudi 30 : repasser en Val Di Rhèmes via la Haute Route Glaciaire ; cet itinéraire avait été suivi par les skieurs Lorientais en mars 2014 ; ils n’avait quasiment rien vu à cause de la Nebbia, brouillard froid de condensation qui remonte du piémont italien ; du coup, pour Armelle et Daniel , skieurs de l’équipe , ce passage sera une nouvelle frontière «  chanceuse » cette fois-ci ! Souhaitent-ils !

Philippe notre météorologue a mis dans sa poche un bulletin favorable et tous nos vœux seront donc exaucés ! Grazie Mille ! Pour Alain et Janine, nos riantecois, ce sera la deuxième fois qu’ils franchiront ce Col Bassac Déré ; évidemment, nous sommes dépassés par 2 binômes de traileurs qui font le trajet que nous poursuivont sur 4 jours, mais en une journée pour eux... Ha ! Vive la jeunesse !

L’été semble bien avancé, car cela se remarque déjà à la fonte accélérée du Ghiacciaio Di Glairetta ; les trois-quarts de la face nord de la Grande Sassière sont en glace vive et de nombreuses bédières ont déjà formé un petit étang en contrebas de la moraine et la dernière pente menant au Col se révèle un peu croulante de pierriers instables . . . Surprise ou pas au Col ? Il est décrit comme un superbe belvédère afin de contempler le Gran Paradiso (Alt 4061m); mais Vincent a beau s’escrimer dans le lorgnon installé sur la borne, nos anges gardiens du paradis ont décidé de nous enfumer de leurs volutes de nuages . Bougre de Saint Pierre ne peut-il pas faire du ménage devant sa bergerie céleste ? A contre cœur, nous dévalons la pente vers le Lago di Goletta qui git au pied de son Ghiacciaio à la langue pendante ; décidément comme tout le monde a soif, il ne reste plus qu’à passer commande en arrivant au rifugio Benevolo ; ce que s’empresse à faire Alain : una birra, per favore ! ! !

Le vaste cirque des glaciers du Fond est un « paradiso » pour les skieurs de printemps ; édifié en 1930 et portant de nom d’un alpiniste valdotain Gian Federico Benevolo décédé au Col de Bionnassay en 1927 ( Massif du Mont Blanc), notre « camp de base » nous avait permis de réaliser plusieurs belles courses à ski en mars 2014 comme La bella Galizia ( Alt:3346m) ou prennent leurs sources la Dora Di Rhèmes côté italien et l’Isère côté français... En ce vendredi 1er juillet , notre balade à la journée va se mesurer au « giro del Truc della Tsainteleina »... Le tour d’un Truc qui va nous permettre de gouter à l’une des sources de la Dora ; nous reprenons la Via 13a en visant l’imposant Granta Parey ( Alt : 3387m), magnifique montagne dolomitique : une vraie citadelle avec des parois verticales hautes de près de 500m ; bref de quoi attirer le regard des grimpeurs et des bouquetins du fait de sa verticalité par rapport aux montagnes voisines constituées de schistes croulants et aux pentes justement désignées pour le ski . Juste après le petit col du torrent du Fond et caché par un jeu de piste de moraines, nous découvrons la merveille du Lago della Tsainteleina , ruban d’émeraude lové dans son verrou glaciaire; en arrière-plan, son Ghiacciaio immaculé conduit au Col Di Rhèmes justement... De quoi donner des idées de traversée à ski pour rejoindre la France . Pique-nique d’extase pour tous nos randonneurs bretons face à ce tableau sublime : on se croirait emporté par l’illumination et l’éclat de certaines peintures romantiques telles celles de William Turner surnommé « le peintre anglais de la lumière » qui effectua plusieurs séjours dans les alpes... Et en Italie justement ! Sur les traces du célèbre peintre de la renaissance Raphael !

Et au détour du « Truc », sur le sentier des marmottes, notre compagnie passe au pied du verrou glaciaire : autre perspective avec la cascade de la Dora Di Rhèmes qui jaillit du flanc de la barrière rocheuse à gros bouillons ! Ces eaux rejoindrons plus bas , dans un profond canyon , les eaux échappées du Lago Di Fond venant de La Galizia . On finit le « giro del Truc » sur la Via 13c... Et una birra au comptoir du refuge Benevolo !

Voilà, faut bien retrouver la vallée... Nous étions partis rive gauche, il y a six jours ! Hé ! La belle affaire ! Nous reviendrons par la rive droite de la Dora en ce samedi 2 juillet.

Mais déjà, à la « colazione de la matina» (petit déjeuner) l’ambiance a changé soudainement : un coup d’œil à la fenêtre et nous entendons le murmure grandissant des clarines tintinnabulant au cou des vaches ! Hé oui ! C’est le jour de la montée en estive ! Cette belle rencontre viendra ponctuer notre descente des mèmes estives... Beau chassé-croisé de ce début d’été ! Et pour s’enivrer encore des dernières fragrances de millepertuis, d’orchidées et de gentianes, nous reprenons la Via 13a : échappée vers le Col Rosset et sa vieille bergerie abandonnée du Grand Vaudalaz ; la cloture d’estive a déjà été dressée par les bergers sur ce versant aux herbages fournis et odorants... Une fois ruminés par les vaches et avec le lait récolté, ils seront transformés en Fontina, le célèbre fromage du Val d’Aoste ! A consommer avec un Vallée d’Aoste Gamay ou un pinot noir !

Fin de cette semaine de vagabondage au petit « ristorante chez Lidia »à nouveau devant une polenta ou une salade... Arrivederci ! Ciao !

 

 

 

 







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