Carnet de route
Rando Pyrénées (Néouvielle) 20-26 juillet 2025
Le 19/08/2025 par Daniel GOUALOU
Randonnée itinérante - Tour du Néouvielle -Hautes Pyrénées -
Club Alpin Français du Pays de Lorient – du 20 au 26 Juillet 2025
Souvent dans les conversations des Montagnards (randonneurs / alpinistes...) ceux-ci évoquent en premier le nom des sommets qu’ils ont gravis ou escaladés ; mais un massif est d’abord le résultat d’un processus d’érosion millénaire. En regardant leur carte, le tracé de leurs pérégrinations suit essentiellement la courbe des rivières et lacs rencontrés ; ce sont eux les premiers témoins de cette élévation des hauteurs... Les Pyrénées portent une identité forte de part la singularité du nom des rivières descendant de leurs flancs. On parle du Pays des « Nives » pour le Pays Basque, des « Gaves » pour le Béarnais et des
« Nestes » et « Adour » pour le Bigorre... Et encore ici, nous n’évoquons que les Pyrénées occidentales ; et sans parler des « Barrancos » espagnols. Laissons-nous donc guider par cette poésie des noms de cours d’eau pour préparer notre cheminement !
Peu après le franchissement du Pont de Moudang sur la Neste d’Aure qui abreuve le pays de Saint Lary Soulan, notre voyage s’élève dans la sombre gorge profonde taillée par la « petite Neste de Couplan » qui jaillit en cascades bruissantes. Le barrage d’Orédon calme cette petite folie pittoresque. Et le lac d’Orédon, comme un fjord majestueux, fait miroir aux parois austères du Pic de Bugatet et au Pic Méchant... Le mal aimé !
J1 : les averses abondantes de cette nuit changent un peu notre plan de randonnée de cette première journée... Il nous faut redescendre les « lacets des Edelweiss et des Ecureuils » pour rejoindre le pont de l’Artigusse. Des volutes de nuées virevoltent sur les flancs du Pic Cabanou... Mais l’horizon se dégage au barrage du lac de l’Oule posé comme un bénitier « salvateur » ! Comme s’il annonçait que nous sommes aux portes du paradis préservé de la réserve naturelle du Néouvielle. Nos pas reprennent le tracé du GR 10, celui qui promène les randonneurs d’Atlantique en Méditerranée... Et nous élèvent peu à peu, en suivant le torrent de Bastan, paradis des truites fario. Lac Inférieur, lacs du Milieu et lac Supérieur : à chaque rivage de ceux-ci, nos regards scrutent la courbe élégante et le scintillement d’argent qui émanent de ces eaux millénaires... Derniers vestiges des anciens glaciers pyrénéens. Mais la nuée sombre nous rattrape au Col de Bastanet (alt 2507m) et nous découvrons ou plutôt devinons la silhouette fantomatique de notre refuge du soir : Campana de Cloutou... Posé près de son « loch » invisible encore tel un château écossais !
J2 : Bel surprise que de découvrir, dans son azur, le « manoir de nos rêves » en ce nouveau matin ; Y’a comme un côté « nordique » dans ses façades de bois blond qui se reflètent dans son lac attenant. Les montagnards pyrénéens sont vernis de pouvoir compter sur ce nouveau refuge qui accueillent y compris déjà en fin d’hiver les premiers skieurs...
Nous reprenons nos sacs pour redécouvrir ce joli vallon de Campana et ses petits laquets, belles gouttes d’eau posées au creux des éboulis, entrevues entre deux battements de cils hier soir. Première « Hourquette » de Cadérolles (alt 2495m) qui nous dévoile le grand vallon de Port- Bielh ; nous plongeons vers son lac, un peu comme si nous allions à la plage. Nous nous affalons sur sa pelouse pour le pique-nique... La haute ceinture des crêtes de Port-Bielh se découpe en dents de scie sur un ciel d’émeraude. Nous avons pris de la hauteur et nos regards peuvent deviner maintenant, vers le sud, les 3000 du massif du Luchonnais.
Un coup de rein pour nous hisser sur la vieille moraine de Gourg Nère et nous rattrapons la « Hourquette » Nère (alt 2465m). Le dôme et la fusée de l’observatoire du Pic du Midi de Bigorre font leur apparition dans l’échancrure du Pas de la Crabe... Rigolo vu d’ ici !
Reste plus qu’à dégringoler vers les petits lacs d’Agalops et de Coueyla Gran ou nous rencontrons nos premières vaches et premiers moutons... Cette rencontre « domestique » nous rappelle que le partage de cet espace qui est pour nous un loisir reste aussi un espace de travail à respecter...
Nous sommes accueillis dans ce navire de pierre du nouveau refuge d’Aygues Cluses. Waouh ! Son intégration dans ce paysage minéral ferait presque douter de sa présence. Même en hiver, son dôme recouvert de neige ferait penser à une petite colline naturellement posée près d’un lac... Seules les antennes annoncent une présence rassurante comme celle d’un phare en haute mer.
J3 : Malgré une partie endiablée de Rubyscub et un magnifique « crépuscule des Dieux » hier soir, la météo annoncée n’est pas folichonne pour tenter à tutoyer les cols aujourd’hui.
Daniel choisi de faire un « détour » par la longue vallée encaissée d’Aygues Cluses... Les nuages annoncés viennent rapidement nous rattraper au pont de Pountou. Au parking de Tournaboup, nous croisons nos premiers cyclistes venus conquérir le célèbre Col du Tourmalet. Chapeau à ceux-ci qui disparaissent dans un épais brouillard. On ose espérer que le col leur est réservé ce matin, comme il est décidé parfois par les autorités routières.
Après un pique-nique rapidement avalé, nous reprenons notre marche fantomatique vers notre havre du soir. Là aussi, nous découvrons, au détour du dernier virage, la silhouette imposante du refuge de la Glère (alt 2184m). La visibilité est si réduite que le lac posé à ses pieds est invisible. Dommage pour ce soir ou nous nous attendions à une nouvelle révélation lacustre.
J4 : ça y est : le mystère est levé... Mais qu’à moitié ! En principe, depuis le verrou glaciaire ou est installé le refuge, le regard porte jusqu’au sommet du Néouvielle et laisse deviner l’enceinte rocheuse ceinturant ce grand bassin lacustre. Mais que Nenni ce matin !
Nous devinons la fière silhouette du Campanal de Larrens qui s’effiloche parfois entre les bans de brumes échappés de la vallée des Gaves ; car, nous nous sommes rapprochés du Pays Toy et son Gave de Gavarnie. La furieuse partie de Rubyscub de hier soir n’a pas réussi à éloigner ce brouillard teigneux ! Qu’importe, nous saurons « jouer » du dédale du chemin biscornu qui doit nous mener vers notre objectif du jour : le refuge Packe (alt 2503m)... Posé comme un autre phare de haute mer bien connu : un autre Armen pyrénéen ! Et comme il existe des phares non gardés, idem pour ces refuges solitaires.
Journée de balade dans les nuages... Une autre magie qui permet parfois des rencontres improvisées comme celle avec les marmottes surprises par ce silence trompeur.
Guidés par le bruit des sources et les éclaircies somptueuses de lumières, nous finissons par atteindre notre navire de pierre échoué sur sa croupe vertigineuse. Le temps d’un pique-nique nous fait plonger le regard vers le lac enchâssé de Rabiet, tel une larme perdue dans la montagne. Et le temps d’un soubresaut de vent, la longue crète de Cap de Long se dévoile jusqu’au sommet majestueux du Pic Long (alt 3192m). D’après les « dire » des naufragés du Packe, il est attesté de voir la « Brèche de Roland » depuis ce promontoire !
J5 : ça y est : le mystère est levé... Sur l’autre moitié ! Enfin ! Le temps d’un soupir, nous apercevons la face Ouest du Néouvielle dévoilant son rempart et ses créneaux. Mais la chape de plomb nous retombe sur le sac à dos. Que faire avec ces prévisions incertaines ?
Nous décidons de nous échapper par la « Hourquette » de Mounicou (alt 2547m), plus accessible que la brèche de Chausenque prévue initialement... Notre déambulation par l’entrelacs du Sarrat de Laguès devient un fil conducteur magique. Nous revoici en Ecosse ou notre imagination nous fait divaguer de petit loch en petit loch... Même si la rencontre d’un monstre quelconque soit peu susceptible de se produire. Du coup, nos pas se font plus légers de peur de déranger et notre présence en ces lieux au milieu de nul part nous fait ressentir cette sensation de forcer la porte de ce paradis évanescent.
Mais le passage de la brèche de »Mounicou » nous transporte d’un coup dans la lumière attendue ! Ouf ! Les langues se délient et le piquenique au soleil devient enchanteur.
L’enchantement se prolonge au franchissement de la « Hourquette d’Aubert » (alt 2498m) : c’est vraisemblablement de ce col central que le regard peut embraser le plus grands nombres de lacs de la réserve et sa position de verrou permet une vision dégagée des montagnes du Sud Bigorre : du Pic Campbiel (alt 3173m) au Pic de Lustou (alt 3023m), et autres sommets frontière avec l’Aragon espagnol.
J6 : Les « Rubyscubeurs » ont remballé leur jeu hier soir. Et du coup ! Ben ! Fait grand beau temps ce matin... Allez, ils veulent bien faire une dernière grimpette pour le « panache » ! Nos pas justement vont nous diriger vers « le pas du Gat » (alt 2465m), belvédère inégalé ; car il fait découvrir la face cachée du Néouvielle : à savoir l’immense paroi sud qui étire ses contreforts du Turon de Néouvielle au Soum de Ramoun en croisant le Pic des Trois Conseillers, soit près de 1 km d’arètes à plus de 3000 m d’altitude. Mais là aussi, la leçon de la « Hourquette de Mounicou » va servir ; car, il faut parfois sortir les mains des poches et remballer les bâtons pour agripper les prises de rocher... Nouvelle discipline appelée « scrambling » par nos montagnards écossais. Et voilà les « Rubyscubeurs » devenus « scrambleurs » : Annyvonne – Marie Paule – Pierre – Armelle et Daniel.
Lorient, le 7 Aout 2025





