Carnet de route
Séjour randonnée Majorque sept 2025
Le 09/11/2025 par Chantal ESVAN
Randonnée à Majorque sur le GR 221 : traversée de la Serra de Tramuntana
Majorque, île principale de l’archipel des Baléares, est couronnée par un imposant massif qui surplombe sa côte ouest de plus de mille mètres. Intégralement traversée par la “route de la pierre sèche” (le GR 221), la Serra de Tramuntana longe le nord-ouest de Majorque.
Cette chaîne de montagnes est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2011. Des sentiers côtiers en balcon aux chemins de crête reliant les plus hauts pics (les puigs), cette traversée sportive de l’île nous a surpris et enthousiasmés.
C’est sur une idée d’Allain Collas, que nous avons décidé de préparer en commun ce trek dans la Sierra Montana. Comme il s’agit d’un trek itinérant avec portage, exigeant sur le plan physique, avec Allain comme seul encadrant, nous avons limité à 10 personnes confirmées le nombre de participants.
Après un vol sans histoires, nous atterrissons à l’aéroport de Palma vers 20h30, le 15 octobre.
Mais il nous faudra attendre au moins 1 h pour récupérer nos bagages.
Le bus A1, nous amène pour 5 euros au centre-ville et nous continuons à pied pendant une demi-heure pour rejoindre notre auberge de jeunesse située près du port. Il fait chaud et cette petite balade nocturne est bien agréable.
Le lendemain, nous prenons un autre bus inter urbain pour le port d’Alcudia, à 60 km de Palma d’où nous avons choisi de faire démarrer notre périple.
Nous avons été impressionnés par la modernité de la "estacion intermodal" souterraine sous la plaza Espagnia. Et que dire des bus ! Ils roulent au gaz, des écrans transmettent les informations, des caméras montrent l'intérieur des soutes aux arrêts, il y a des prises USB à chaque siège, wifi gratuit … Nous payons dans le bus en scannant notre CB sans contact en montant puis à la descente. Très pratique, en revanche, nous ne savons pas combien nous payons !
Alcudia, cité médiévale est la plus ancienne ville de Majorque. Cette ancienne capitale romaine fut fondée en 123 avant J.-C. Nous prenons beaucoup de plaisir à parcourir son centre historique et à déambuler sur les remparts protégeant la vieille-ville très bien préservée.
Du port d’Alcudia ou nous étions logés, nous assistons à un magnifique coucher de soleil après une première baignade dans la Méditerranée.
La première étape, d’Alcudia à Pollença, est la plus facile du parcours (environ 14,5 km de marche avec un très faible dénivelé), mais pas la plus agréable. Nous longeons la mer sur une piste cyclable, à côté de la route et le soleil cogne fort.
Une petite baignade dans la baie de Polença nous rafraichit avant de prendre une petite route de campagne sous un grand soleil et rejoindre notre refuge de Pont Roma.
Nous y restons deux jours et le lendemain, nous effectuons l'ascension du Puig de Maria, un petit promontoire de seulement 321 mètres, isolé dans la plaine de Pollença, premier ermitage féminin de Majorque au XIVe siècle.
Après une ascension raide sur un chemin pavé et souvent accidenté, nous avons une vue superbe sur la baie de Pollença et la baie d’Alcudia.
Notre deuxième étape, le lendemain, nous conduit après 19km et 900 m de dénivelé au monastère de LLuc, ou nous séjournons pendant quatre jours.
Cette étape au départ de Pollença est relativement tranquille. Les deux premières heures de marche se font sur un chemin assez plat. Nous cheminons le long des murs de pierre sèche, entourés par les oliviers, les figuiers, les bougainvilliers, les pistachiers, les lauriers roses…
La pierre sèche, « pedra en sec » en majorquin, est une manière simple et efficace de construire avec les matériaux de l’environnement, des murs, des maisons, des routes, des chemins, des ponts et des éléments de la culture populaire tels que les nombreux sites d’exploitation du charbon de bois, les fours à chaux, les mines, les fontaines ou les fosses à neige.
Ce n’est qu’ensuite que le sentier commence à vraiment grimper dans les montagnes, vers le village de Lluc. Le paysage se transforme, Nous avançons dans les forêts de pin, de chênes verts puis un épais maquis percé de blocs de granite gris.
Nous pénétrons dans le monastère par la place des Pèlerins, ornée de magnifiques porches et jardins, déployés autour d’une belle fontaine de style Renaissance.
A l’origine, « Lluc » (lucus en latin) désigne un « bois sacré », La construction du monastère dans sa forme actuelle (en croix latine) remonte au début du XVIIème siècle. L’édifice de style baroque abrite aujourd’hui un espace dédié à la méditation et à la prière (la « Maison de la Spiritualité ») ainsi qu’une chapelle, des salles de réunion, des « cellules » destinées aux retraites, des jardins et un beau musée consacré à l'histoire du site. La basilique elle-même est une imposante construction de 28 mètres de long sur 13 mètres de large, rehaussée d’une coupole. C’est dans la chapelle que se trouve la fameuse statuette de la Vierge noire (la « Moreneta ») devant laquelle les pèlerins viennent se recueillir.
A LLuc, il a fallu composer avec la météo qui nous prévoyait des orages. Nous avons cependant réalisé l’ascension du Puig Tomir, ainsi qu’une jolie boucle autour du monastère qui nous a permis de découvrir un étrange jardin de rocaille ainsi qu’une yeuse (chêne vert) de 500 ans
Nous avons remplacé l’ascension du Puig Roig, par une randonnée au départ d’Escorca à l’entrée des gorges du Torrent de Pareis.
Nous garderons un souvenir très fort de la randonnée au Puig Tomir : ce fut une belle randonnée alpine sur des sentiers muletiers et des langues d’éboulement, avec deux passages d’escalade rocheux à franchir avec chaines et échelles. Il a fallu s’aider des mains et pour certains s’encorder. Mais, le panorama depuis le sommet fut une belle récompense.
Notre troisième étape, nous mène, le lendemain, au refuge de Tossals Verds, au cœur de la Sierra Montana. Nous entamons tranquillement la montée sous le couvert des arbres. Le temps est gris mais il ne pleut pas. Sur les pentes escarpées, les chèvres sauvages gambadent parmi les carritx ou ampelodesmos, une herbe très longue que l’on trouve presque partout. Nous empruntons une variante du GR pour atteindre le puig d’En Galileu (1185m).
Nous montons régulièrement et quelques gouttes viennent nous chatouiller, mais une dernière montée raide nous permet de franchir le col de ses Cases de Neu. Le brouillard nous rattrape en fin de pique-nique et nous accélérons le pas pour passer sur le versant de l’autre côté et reprendre la route vers le refuge.
C’est encore une étape longue (17km et 660m de dénivelé) mais très variée avec les plus beaux vestiges de pierres sèches de tout le parcours. Nous découvrons une cabane de charbonnier en pierre sèche surmontée d’un toit en chaume, des puits (casa des Nevaters) qui servaient de frigo et dans lesquels on fabriquait de la glace ! Ces puits de 6 - 8 mètres de profondeur dans lesquels on empilait la neige et la paille en couches successives sur toute la hauteur, la forme ainsi que la profondeur favorisent le maintien du froid... voilà donc pourquoi ce parcours s’inscrit au Patrimoine Mondial de l’UNESCO.
De Tossals Verds vers Soller, c’est l’étape la plus difficile (18km, 670m de dénivelé positif et 1160 m de dénivelé négatif) car c’est la plus longue avec un passage un peu technique dans les gorges.
Allain a choisi de nous faire passer par le Pas Llis plutôt que par les tunnels. Un passage rocheux sécurisé par des chaines nous demande un peu de temps et d’attention.
Depuis le col de l’Offre, la vue se dégage sur le lac de Cuber et sur le sommet culminant de l’île : le Puig Major (alt 1436m) sur lequel on aperçoit le dôme des transmissions militaires dont Le camp est situé en dessous du sommet...
Après le pique-nique au bord du lac, nous entamons la très longue descente vers Soller par le canyon de Binaraix.
Nous prenons sur un chemin empierré, en lacets au milieu des oliviers et des chênes verts. C’est une combinaison fascinante de marches en pierre, de rochers, d’eau et de végétation sauvage.
On traverse des gorges dans lesquelles le sentier de pierres sèches repose sur des soubassements de plusieurs dizaines de mètres en pierres sèches. On a du mal a imaginer le travail qu’il a fallu pour la construction de ce chemin ! Le Barranc de Biniaraix constitue l’un des plus beaux paysages de la Serra de Tramuntana et a été déclaré « bien public culturel ».
Nous traversons encore le joli village de Fornaluxt avant de nous installer dans notre hôtel à Soller.
Mais, le plus dur reste à faire : trouver un restaurant pour 10. Tout est plein. Soller est une jolie ville très touristique et tout y est réservé longtemps à l’avance. Nous optons, en dernier ressort pour une pizzeria située dans un endroit un peu excentré.
Le lendemain, nous levons le pied pour une journée de récupération. Nous prenons le temps de visiter Soller et le Port de Soller à 3km.
Le cœur de Sóller tourne autour de la Plaza Constitución. Sur cette place, très animée et assez bruyante, nous sommes interpellés par les façades de la banque et de l’église, à l’aspect moderniste, œuvres de Rubió, élève de Gaudi.
La baie large et profonde abrite une plage d’environ 1 km, bordée de nombreux commerces et restaurants et prolongée par un port de plaisance, quelques bateaux de pêche et à la pointe un terrain militaire. L’histoire maritime de Sóller se reflète dans l’architecture des maisons cossues du front de mer.
Le lendemain, le bateau nous dépose, au bout d’une heure de navigation dans la petite crique de Sa Calobra. Après un quart d’heure de marche et le passage de deux petits tunnels, nous arrivons à la cala du torrent de Pareis surplombée par les immenses parois rocheuses du torrent. Dans ce site grandiose nous nous sentons tout petits.
Après de courts passages à travers le lit du cours d’eau couvert de graviers nous gravissons pendant deux heures, en contournant, ou en sautant, voire en glissant sur les fesses, de gros blocs de rochers.
Autour de nous, s’élèvent des falaises abruptes hautes de 200 mètres formant un paysage karstique impressionnant.
Après la baignade à la petite plage de galets, surpeuplée, de Sa Calobra, nous reprenons le bateau pour Port de Soller.
Pour notre dernière journée à Soller, nous avions envisagé une randonnée au Puig de Balixt, mais nous avons dû renoncer au bout de 2 h, car un propriétaire nous interdit le passage sur sa propriété. C’est l’une des difficultés rencontrées par les randonneurs à Majorque. Il est difficile de s’écarter du GR et de nombreuses randonnées, bien que proposées dans les guides sont en réalité impossibles.
Dimanche 28, cinquième étape : nous quittons Soller pour Deia. Nous avions prévu de passer par le bord de mer, mais nous rencontrons les mêmes difficultés que la veille. Tous les accès à la côte sont barrés et nous devons plusieurs fois revoir notre itinéraire. Lorsque nous parvenons enfin à rejoindre le sentier littoral, il nous faut être très attentifs car certains passages sont devenus difficilement praticables, suite aux tempêtes hivernales et aux glissements de terrain.
Nous traversons le joli village de Llucalcari et le sentier passant par d’anciennes oliveraies nous a offert de belles vues sur le littoral. Quelques courageux ont choisi la baignade dans la cale de Deia, avant de monter au refuge Can Boi.
Lundi 29 : sixième étape
Nous quittons notre refuge vers 9h. Il vente et le temps est couvert. Nous entamons une longue montée sur le GR. Malgré quelques gouttes, le temps reste clément jusqu’en début d’après-midi et nous avons tout le loisir d’admirer une des nombreuses charbonnières constituées d’une petite cahute en pierre ou résidait le charbonnier et d’une plateforme cylindrique sur laquelle était érigée la meule de bois qui en se consumant lentement allait se transformer en charbon. Nous croisons beaucoup de randonneurs aujourd’hui.
Vers 14h, l’orage éclate. Nous enfilons les vestes imperméables, protégeons les sacs et les bâtons et nous continuons par la route forestière jusqu'à la jolie ville de Valldemossa, village de montagne aux ruelles pavées étroites et souvent escarpées. Nous prenons le temps de le visiter et de flâner dans son dédale de ruelles fleuries. Le centre historique est entièrement piétonnier et les maisons de pierres typiques ont été bien conservées et restaurées. De plus, la visite nous livre de magnifiques points de vue sur le paysage environnant.
Septième étape : Valldemossa- Esporles
Nous avons une grosse frayeur au moment de partir : la gérante de l’hôtel nous informe que Majorque est en vigilance orange et qu’une violente tempête peut nous concerner.
Apres étude attentive de la météo, Allain choisit de partir immédiatement pour pouvoir passer sur les crêtes avant 11h.
Finalement, le temps s’améliore petit à petit et nous pique niquons sur les hauteurs, une fois le soleil revenu. Nous entamons ensuite la descente tranquille vers Esporles et nos dortoirs au « Sa Fita Backpackers ».
Septième étape : Nous quittons Esporles le lendemain sous un beau soleil en direction d’Estellencs. C’est notre dernière journée de trek. Alain a choisi d’écourter l’itinéraire pour éviter de belles côtes.
Nous arrivons donc de bonne heure à l’hôtel Maristel pour profiter de la baignade à la Cala d'Estellencs pour certains et de la piscine pour d’autres.
Estellencs est un petit village accroché à flanc de colline, aux ruelles étroites, où le temps semble s'être arrêté. Ses rues pavées, ses maisons en pierre et ses vues panoramiques sur la mer créent une atmosphère chaleureuse et pittoresque.
Là encore, nous avons été acceptés de justesse dans le seul restaurant ouvert.
Jeudi 02 octobre : Apres un excellent petit déjeuner, nous prenons le bus pour Palma. Nous avons deux demi-journées pour visiter cette jolie ville avant de reprendre l’avion et de rentrer.
Au premier abord la ville de Palma de Majorque peut sembler être un vrai labyrinthe. Elle regorge de ruelles, de places et d’églises. Mais, bien qu’étant la ville la plus importante de l’île de Majorque, elle n’est pas très grande et tout peut se faire à pied, de la « Plaza de Espana » au bord de mer.
Nous découvrons le Casco Antiguo, cœur historique de Palma avec la cathédrale gothique, La Seu et les bains arabes, vestiges de l’époque musulmane.
Connue comme « La Cathédrale de la Lumière » grâce à ses 58 vitraux et ses 5 rosaces, la cathédrale est un des édifices religieux les plus importants d’Espagne Les dimensions impressionnantes de la cathédrale et particulièrement de sa nef en font le deuxième plus grand édifice religieux d’Espagne, après la cathédrale de Séville.
Bien sur, nous découvrons la Plaça Major et son marché d’artisanat et assistons aux spectacles de rue qui ponctuent le parcours. Et avant de rentrer, nous faisons nos emplettes au marché Olivar, marché couvert qui se situe sur la place de l’oliveraie.
La petite balade le long de la mer permet également d’admirer la cathédrale depuis le parc de la Mar, un petit lac d’eau salée avec une fontaine.
Quel plaisir ensuite de déambuler dans les ruelles pavées, et d’admirer les façades très colorées et leurs balcons en fer forgé.
En fin de journée, nous reprenons le bus pour l’aéroport de Palma.
En résumé : Un trek magnifique du début à la fin, 220 Km de marche pour 7550 m de dénivelé positif et 7450m de dénivelé négatif quand même.
Il faut noter la bonne cohésion de l’équipe, l’esprit d’entraide et la bienveillance de tous tout au long du trek. Ces randonnées nous ont parfois demandé un bon niveau d’engagement et nous ont permis de faire de belles découvertes sur le plan culturel.





